3h15 du matin ... A Bodø, Patita quitte les cales du Midnatsol (Soleil de minuit) alors que le jour se lève . Le ciel est couvert, on sent que ça va tomber bientôt ... Le temps de consulter mes cartes et je reprends la route...

Au bout de 5 km, je m'arrête pour faire le plein et suis rattrapé par la pluie : des trombes d'eau . Impossible de repartir , on ,n'y voit rien ... Je somnole donc une petite heure dans un coin du parking de la station Shell en attendant que ça se calme . Je programme Albert, mon GPS, et là, il me déçoit beaucoup  : d'abord, il m'oblige à prendre l'autoroute sur 10 km, puis il m'indique qu'il est impossible d'éviter les routes à péage ! 

Car , en plus des péages à l'entrée des villes  (très fréquents en Norvège), les routes alentour sont, elles aussi, taxées ... Le contrôle se fait par une caméra qui lit les plaques ... et connaît les coordonnées bancaires du propriétaire :  prélèvement direct, instantané, et automatique sur le compte en banque ! ... Pour les touristes, un panneau en anglais indique qu'il faut se garer près de la guérite où l'on vous expliquera comment donner l'empreinte de votre carte bancaire pour bénéficier des mêmes faveurs ... Enfin, je crois que c'est ça, mais je ne parle pas anglais , donc je ne me gare pas près de la guérite .  Aussi suis-je salué à chacun de mes passages par un panneau lumineux figurant cette chère caméra encadrée de feux clignotants !

Ça vous amuse ? Pensez que ce sera sans doute bientôt comme ça chez nous !!!!!!

Le temps se calme un peu et la route est peu encombrée (il est encore très tôt) mais il ne faut pas relâcher son attention car , parfois, de gros promeneurs déambulent  tranquillement sur la chaussée sans prêter trop d'attention à une petite 2cv resquilleuse ...

Je suis toujours à la recherche d'un garage pour changer mon cardan qui craque ... à force de demander dans les stations-service (qui sont des épiceries-café-fast food) je finis par trouver un garagiste sympa qui, bien qu'en week-end (Vendredi-Samedi-dimanche en été) accepte d'intervenir sur Patita  après que je lui ait expliqué en démontant une aile sur le bord de la route que l'opération était simple et rapide à exécuter). Merci à ce Monsieur, patron du Garage SEMEK à Glomfjord  . Patita a parcouru plus de 10000 km en 41 jours depuis Limoges !

Longues côtes, passages en montagne parmi de somptueux glaciers, 

redescente rapide au niveau des fjords ...

...attente plus ou moins longue du bac pour traverser : ça repose la mécanique et le bonhomme, tout va bien !

Entre Jekvit et Kilboghamm, alors que le temps se gâte à nouveau, sur le bateau. Il y a de fortes rafales de vent et un peu de houle . Je passe le Cercle Polaire dans le sens Nord - Sud ... J'ai eu la chance d'embarquer en première ligne, je descendrai donc le premier .

Je sais qu'il y a un camping non loin du débarcadère, je pourrai m'y précipiter pour tenter d'y louer une "kabin"  (un petit chalet) pour la nuit car la pluie est devenue très forte et la température est descendue à 12° ... Il n'y aura sans doute pas de place pour tout le monde, et les motards qui ne connaissaient pas le chemin et sont arrivés après moi s'inquiètent ... (Je vous rassure, finalement, ils ne dormiront pas dehors).

A 17 h... après 204 km, me voici au chaud et au sec au Norkapp Kemping de Kilboghamm, avec vue sur la fjord . Patita bouge à  chaque coup de vent ...

Le problème, avec les îles Lofoten, c'est que c'est beau, même sous la pluie ...Le problème , avec la pluie (et le vent), c'est que ça ne donne pas envie de s'arrêter et de descendre de voiture pour prendre des photos . Le problème, avec les appareils numériques, c'est que le  mauvais temps n'apparaît pas bien sur les photos . Voici donc quelques photos assez jolies qui ne vous rendent pas bien compte des rafales violentes qui secouent Patita ni des douches  glacées que je subis lors de mes sorties éclair  hors de la 2cv, le temps d'un cliché ...

Que faire quand on est sur la route par un temps pareil ? S'arrêter en attendant que ça passe ou rouler ... Comme ça n'a pas l'air de vouloir cesser, je roule . Patita est sympa, elle traverse tout ça avec flegme et ronronne dans l'adversité ... je ne verrai pas trop changer les vis platinées ou les charbons de dynamo par ce temps là ...

Bien sûr, je me régale de ces paysages, mais je souffre pour Patita qui lutte contre les éléments, au passage d'un pont (du genre de celui qui apparaît au fond de la photo ci -dessus) une station météo affiche un vent transversal de 17 m/secondes, au milieu de la traversée je dois m'agripper au volant, les deux mains à droite, pour éviter d'être envoyé sur le rail de gauche ... heureusement que je suis pratiquement seul sur la route.

Puisqu'on parle de Patita, je fais une étonnante constatation : malgré la violence des éléments, pas une seule goutte d'eau ne pénètre à l'intérieur ! (Même pas la petite fuite froide traditionnelle qui s'acharne avec une régulière précision à tomber sur le pied droit du conducteur...) Aucune des 2cv que j'ai pu conduire jusqu'à ce jour (Un certain nombre) ne m'a habitué à une telle étanchéité . Respect !

Je me fixe comme objectif la petite ville de Reine, au sud de l'archipel, soit pour m'y arrêter un peu, soit pour y embarquer sur un ferry pour le continent , on verra ça en fonction de la météo et des circonstances .

De fjords en petit ports, de rives plates en cols raides, d'averse violente en éclaircie furtive, Paita avance inlassablement. ... moi, je commence à en avoir marre et mets beaucoup d'espoir dans ce petit port que je me suis fixé comme but du jour ... et je m'acharne , allez, roule !

Hélas, je suis déçu à plus d'un titre en atteignant Reine : d'abord , la pluie redouble, et elle est froide ... Ensuite, la petite ville ne m'apparaît pas très accueillante : de nombreux randonneurs descendent, trempés, des montagnes ou de petits bacs qui leur ont fait traverser le fjord  ... un bistrot bondé , bruyant, et embué , des bords de route envahis de camping-cars, des stationnements payants, des WC publics payants accessibles uniquement avec une carte d'abonné, et pas de quai pour le ferry ... Zut, je me suis fait rincer en faisant un petit tour à pied (et en allant faire un petit pipi au coin d'un hangar!) , je remonte dans Patita, qui, bonne fille, démarre au quart de tour, et je repars dans l'autre sens à la recherche d'un port plus accueillant où je trouverai un embarquement ....

Avec le recul, je me dis que ma vision de Reine n'est pas très objective et que ce petit port doit être plutôt sympathique ... il faudra que j'y retourne un jour de grand soleil  !

Me voici donc à nouveau en direction du Nord, toujours dans les mêmes conditions climatiques ... au bout d'une trentaine de kilomètres, j'arrive à Stamsund et me dirige vers le port , la carte Michelin y indique une ligne de bateau vers le continent (comme à Reine, d'ailleurs, où je n'ai pas trouvé trace d'un embarcadère ...) On verra bien... Ce qui me console, c'est que, même si le temps est exécrable, même si je suis déjà passé par là aujourd'hui, je ne me lasse pas des paysages .

A Stamsund, il ne pleut plus ...donc le moral remonte . Un tour sur le port ne me révèle aucun embarcadère de ferry, je ne comprend pas ...Heureusement, il y a du monde et je peux demander s'il y a un bateau : "Oui, on l'attend dans les minutes qui viennent" ( ??? ) Ce n'est pas un ferry que je vois arriver mais " l'express côtier " qui, du printemps à l'entrée de l'hiver, relie tous les ports Norvégiens de Bergen à Kirkenes ...

Les voitures (pas trop grosses) n'y pénètrent pas par une rampe mais par une porte sur le flanc du bateau, un ascenseur les descend au pont-garage où un voiturier prend le volant pour les ranger ... quand il voit arriver Patita, affolé, il refuse de s'en charger et c'est moi qui effectue la manoeuvre (tant mieux!)

Nous sommes enfin au sec, pour 4 heures de traversée à bord d'un vrai bateau . A force de ne pouvoir nous arrêter, nous avons parcouru aujourd'hui 400 km ! Patita peut se reposer dans son garage tandis que je vais m'avachir sur les banquettes moelleuses d'un salon déserté , harassé !

Faisons le point : nous sommes au Nord de l'Archipel Lofoten-Vesterålen (Généralement appelé "les îles Lofoten") , à plus de 300km au Nord du Cercle Polaire Arctique ... Partie d'Andenes, la route retrouve  la Mer du Nord après une incursion par l'intérieur des terres vers Bleik ... vous vous y retrouvez ?

A cet endroit, une montagne se jette dans la mer, on peut voir au bord de la route de gros rochers détachés de la falaise .  Près du phare se trouve une grotte qui, (si j'ai bien compris l'explication en anglais d'une plaque en anglais, je n'ai rien trouvé dans les guides concernant ce lieu) depuis la nuit des temps, a  servi de lieu de culte pour les populations indigènes . Abandonné , l'endroit a été récupéré beaucoup plus tard pour y célébrer des rites d'inspiration chrétienne . Ces pratiques  y ont été interdites au milieu du 20ème siècle , et la grotte rendue à la nature .

On s'y arrête désormais pour admirer le paysage, un parking a été aménagé et un long bâtiment en béton attire l'attention : c'est une fine lame horizontale, assez élégantes , sous laquelle se remarque un mystérieux parallélépipède d'acier inoxydable poli et de verre fumé ...

Si je n'ai pas été vraiment  séduit par la grotte, ce petit bâtiment a attiré ma curiosité .

Quand on s'approche, c'est bizarre , où est l'entrée ? Ah oui, sur le côté ... Entrons, c'est gratuit !

En fait, ce sont des toilettes publiques ...mais c'est du grand luxe ! Spacieux et tout en inox, ça brille , tout est d'une propreté impeccable! (On n'est pas dans des toilettes d'aire de repos d'autoroute telles qu'on les connaît chez nous ...)

Ça brille, mais ce n'est pas tout : le clou du spectacle, c'est la paroi entièrement vitrée, du sol au plafond et d'un mur à l'autre, face au siège : assis, vous pouvez admirer le coucher de soleil sans être vu, car il s'agit bien sûr de verre sans tain et, même avec la lumière allumée, ce qui se passe à l'intérieur est totalement invisible de l'extérieur !

Et, pendant ce temps là, Patita joue les vedettes sur le parking ...

Je n'ai pas réussi à rencontrer le propriétaire de la 2cv rouge découverte au centre d'Andenes, à l'abri de son garage...Dommage, c'est la première 2cv que j'aperçois depuis la Slovaquie ! Je ne peux que marquer mon passage en lui laissant sous l'essuie-glace un autocollant de "2cv Passion" ...

Le lendemain, à l'aube, je vais faire une promenade sur la plage du camping, mais le ciel est lourd et il commence à pleuvoter . Retour à ma voiture-maison pour le petit déjeuner et le repli du campement et en route, je longe maintenant la côte Ouest de l'île sous une succession d'averses et d'éclaircies.

Même avec la pluie, les paysages sont splendides . La côte est rocheuse, parfois, un petit tunnel évite de contourner la montagne.

Près d'un étrange bâtiment ultra-moderne (J'en ai déjà parlé sur ma page facebook, mais je lui consacrerai la page suivante de ce blog, pour ceux qui n'ont pas suivi le voyage en direct...), je rencontre un jeune couple de français ,ils viennent de Lyon à vélo (!)...partis au mois de Novembre dernier ils sont passés par la Corse, l'Italie, l' Albanie , la Grèce etc...avant de remonter vers le Nord !!! Après neuf mois de voyage, ils attaquent le retour pour être rentrés chez eux en Novembre prochain ! Patita et moi sommes de bien petits voyageurs par rapport à eux !

Je reste un moment à bavarder avec eux tandis qu'ils plient leur campement et me proposent de partager leur "vrai café" ... car, soucieux de leur confort, ils ne se contentent pas de café soluble et transportent donc une cafetière .

Je me régale des paysages malgré les averses, jusqu'à ce que la pluie ne prenne des proportions impressionnantes , je suis même obligé de m'arrêter à plusieurs reprises car je n'y vois plus rien ... Pour prendre des photos, ce n'est pas le temps idéal mais au moins suis-je à l'abri dans la voiture, et j'ai une pensée compatissante pour mes cyclistes qui ne doivent pas être à la fête .( Je me rend compte que j'ai oublié de noter leurs noms et adresses, s'ils lisent ces lignes je serais content qu'ils me donnent de leurs nouvelles  )

J'ai quelques problèmes d'essuie-glace : le balais côté conducteur n'adhère pas bien au pare-brise, je dois à nouveau le bricoler à l'aide d'un élastique de siège ...ce petit anneau de caoutchouc bien connu des voyageurs en 2cv leur rend un nombre de services incalculable , c'est lui qui permet de raccrocher tous les éléments qui manifestent des envies d'indépendance !  

Il est frustrant de se promener dans des endroits si jolis et de n'en pas profiter pleinement à cause de la météo ...parfois, cependant , une éclaircie bienvenue me console .

Il m'arrive même de me dire : "Ce n'est pas possible,  c'est trop beau !", là, par exemple  :

A cet instant, Patita en est au 40ème jour de voyage, et a parcouru 9705 km depuis son départ du Relais de l'Auto ancienne à Limoges !                     A suivre...

Circuler le long de la côte Norvégienne, c'est embarquer constamment sur des ferries pour traverser les fjords ... Pour me rendre aux îles Lofoten j'attends le premier à Skarberber, : une heure d'attente pour 25 minutes de traversée  ...

Un deuxième bateau m'emmène de Bognes à Løbingen, me voici sur les îles Lofoten , un vieux rêve ... Les traversées sont toujours d'agréables moments de repos pour Patita comme pour son conducteur qui en profite pour traîner un peu sur les ponts et apprécier les paysages ...

Le soleil , un peu voilé jusque là, éclate pour les premiers kilomètres îliens, je ne suis pas déçu et j'en profite pour ouvrir la capote de Patita hélas, un de ses élastiques casse et je suis condamné à la refermer, sans doute pour le reste du voyage ... (Bon, ce n'est pas très grave,je râle un peu mais ce genre de "panne" ne compromet pas la suite du voyage ).

J'ai décidé de me diriger vers Andenes, tout à fait au Nord de l' ïle par la route de l'Est, je reviendrai par celle de l'Ouest .

Au village de Dveberg, comme je me suis arrêté pour photographier de loin la petite église, un ouvrier descend de son échafaudage et traverse la route pour venir m'indiquer le petit chemin caché qui permet de s'en approcher .

Il est vrai que l'église octogonale est encore plus jolie vue de près, entouré de son petit cimetière envahi d'herbes folles, sur fond de mer et de montagnes ...

Patita, cabotine, en profite pour poser sous le porche d'entrée, elle trouve que ça lui va bien ... Un peu plus loin elle rencontre quelques contemporaines .

Et puis c'est l'arrivée au port d'Andenes d'où partent chaque jours des bateaux qui emmènent les touristes à la rencontre des baleines. La publicité est alléchante : si on ne voit pas de baleines, vous pourrez embarquer gratuitement le lendemain ... ça suppose qu'on puisse attendre là plusieurs jours, et puis les tarifs sont un peu élevés pour moi . Donc, je me posterai sur la dune en bordure du camping et scruterai l'horizon ... je ne verrai rien, sans doute , mais c'est gratuit .

Le village est plaisant avec ses maisons peintes ...mais pas très animé. Un petit port, un café qui accueille quelques touristes, deux trois commerces, une station-service, un petit supermarché et le camping , vaste plateau en bord de mer ( bien ventilé!) aux installations assez confortables.

A Suivre ...